Rencontre avec Catherine, accompagnatrice dans les Dolomites

Depuis combien de temps encadres-tu des groupes Terdav dans les montagnes italiennes ?

J'ai passé mon diplôme d'accompagnatrice en 1991, cela fait donc une quinzaine d'années, entre le Viso, la Sardaigne, le Grand Paradis et les Dolomites. J'aime les treks à caractère très « alpin », avec de beaux passages en altitude, en hors-sentiers, ou bien dans les latitudes nord, car ces milieux se ressemblent. Ce qui me plaît le plus, c'est de permettre aux gens de se dépasser, de découvrir des espaces sauvages, de se sentir tout petits dans la nature. Peu importe le niveau, c'est un vrai plaisir d'encadrer des treks et de « tricoter » avec la météo, les éléments, l'itinéraire, l'humeur des participants et leur forme physique, pour que chacun y puise le meilleur.

Quelles sont les caractéristiques des montagnes italiennes ?

Les montagnes italiennes ont pour particularité d'offrir une grande variété de paysages. L'Italie, c'est à la fois le massif des Abbruzes, à l'est de Rome, qui abrite encore des ours, mais aussi les montagnes si secrètes de la Sardaigne orientale (l'un des meilleurs exercices d'orientation qui soient !) ou bien encore les volcans des îles Eoliennes... A savoir qu'on trouve quelques perles en termes de randonnée dans l'arc alpin italien :

• le mont Viso et les petits villages de montagne ;
• le Grand Paradis avec des paysages de Rocheuses américaines ;
• la vallée d'Aoste avec les faces sud des 4000m du mont Rose et du mont Blanc ;
• et plus à l'est, à la frontière autrichienne, tout l'ensemble des Dolomites, les montagnes les plus atypiques qui soient.

En quoi les Dolomites diffèrent-elles des autres massifs alpins ?

En montagne, tout commence par la géologie. Les Dolomites constituent un massif vraiment à part de ce point de vue, formé par une roche sédimentaire sensible à l'érosion et qui offre des paysages ruiniformes et de vastes éboulis. Cette roche est une championne de la couleur : très claire, presque blanche, elle reflète la lumière du ciel et du soleil dans des tons variant de l'ocre au rouge flamboyant, à l'origine du célèbre « enrosadira » (rougeoiement du soir). De plus, les Dolomites sont formées d'une multitude de massifs, comme des écailles de gros poissons émergeant d'une mer d'alpages. On échappe ici à la structure plus classique des vallées glaciaires, pour déambuler entre les groupes de sommets, au départ des grands cols routiers d'altitude. Là, peu de glaciers et de hautes altitudes (le sommet le plus haut est la Marmolada à 3343m), mais des forteresses de pierre qui se dressent partout et invitent le curieux randonneur au voyage.

Les Dolomites sont-elles réservées aux très bons marcheurs ?

Non ! Le nom des Dolomites est attaché à celui des via ferrate, sentiers d'altitude équipés de câbles, qui datent pour beaucoup de la Grande Guerre. Mais il ne faut pas oublier le vaste réseau de sentiers accessibles à tous et bien entretenus qui parcourent le massif. Comme souvent en Italie, les routes carrossables passent haut en altitude, et permettent de profiter des alpages en s'épargnant les marches d'approche fastidieuses. De même, grâce à cette géographie particulière, on profite souvent d'itinéraires en traversée ou en balcon, panoramiques et peu difficiles.

Quel est ton site préféré dans le massif ?

Dans la partie nord, j'aime l'arrivée au pied de la Croda del Beco, dans un décor de taïga d'altitude, où il ne manque que les Indiens ! L'ambiance étrange de la Forcella di Lech, fenêtre ouverte (et ventée !) sur le décor suivant, et l'étonnant sentier de descente où l'on admire toute l'ingéniosité d'un peuple pour rendre ces espaces praticables. Dans la partie sud, coup de cœur pour le Passo Principe et le Pas de Molignon, fantastique décor d'aiguilles, que j'ai souvent passé dans un semi-brouillard qui ajoute au mystère !

Quelle est l'ambiance dans les refuges italiens ? Qu'est-ce qu'on y mange ?

L'Italie est un pays à la croisée de plusieurs cultures : autrichienne, italienne et ladine. La carte postale que la nature nous offre ici ne serait pas complète sans ce que l'homme en a fait :

• Des refuges soignés, très propres, spacieux ; loin des dortoirs surpeuplés, on trouve plutôt de belles grandes chambres communes (et une déco locale, avec trophées de chasse et tutti quanti)
• Des hôtes, professionnels de l'accueil, en tenue tyrolienne s'il vous plaît !
• Une langue ou plutôt trois dans cette région : le ladin, parlé par une minorité linguistique de 30000 personnes, l'allemand, et l'italien que l'on retrouve sur les panneaux et dans les conversations.
• Côté cuisine, bien sûr, on est aussi sous influence plurielle. Beaucoup d'Italie, un peu d'Autriche, et du Ladin bien présent : on se régale de pâtes, mais aussi de canederli, la boulette de jambon ladine, de cajinci, raviolis de pommes de terre, et de soupe d'orge... Un conseil, testez (avec modération) le Lagrein, l'excellent vin du Haut-Adige !