Rebonds à travers les Alpes, entre Bavière, Tyrol et Dolomites
Douze jours de marche et 800 à 1000 mètres de dénivelés quotidiens à travers la Bavière, le Tyrol et les Dolomites. C'est le défi auquel s'est frotté Florent de Terres d’Aventure Lyon en juillet 2022. Une errance racontée dans le numéro 7 de notre magazine TERRE.
L'arrivée à Munich est matinale. Le temps de prendre un café à la gare centrale et je rejoins mes compagnons de marche ainsi que notre guide, Laurent. Nous sommes six en tout, un petit groupe comme je les aime, idéal pour aborder ce trek engagé. Nous prenons un train en direction de Füssen. De là, l'aventure commence par une parenthèse culturelle : la visite des châteaux de Louis II de Bavière s'impose. Il s'en dégage une ambiance féérique qui traduit bien la mégalomanie du personnage.
Le guide en profite pour nous briefer sur le parcours : « Rien d'insurmontable pour de bons marcheurs mais vous devez le savoir : il peut y avoir de la pluie – beaucoup de pluie –, des franchissements de névés et d'autres passages vertigineux où nous devrons utiliser des câbles ». Le ton est donné. Les prochains jours ne seront pas de tout repos.
Verte Bavière
Pourtant, le premier sentier emprunté est plutôt doux, au sein d'une forêt de résineux, rien de bien difficile. La Bavière a cette image de « montagne à vaches ». Traduction : des alpages avec peu de dénivelé. Nous comprenons rapidement qu'il n'en est rien, les déclivités sont impressionnantes par endroit. La toute première nuit a lieu dans un refuge qui ressemble davantage à une petite cabane au fond des bois. Le seul bruit vient du ruisseau qui coule en contre-bas. Quel calme ! Lendemain difficile, une journée de pluie continue nous attend.
On ne nous avait pas menti ! La Bavière est arrosée ! Heureusement, il s'agira de l'unique précipitation du parcours, une immense chance ! Ce massif reste une vraie révélation. Certes, nous n'atteignons pas les 4 000 mètres mais les paysages sont grandioses et très variés : forêts, lacs, pierriers et quelques sommets aux pics acérés. Nous passons un col- frontière en guise de dernière étape puis nous arrivons en Autriche.
Tyrol, une carte postale
Nous atteignons les premières habitations et je suis tout de suite envoûté par le décor : chalets en bois, balcons débordant de géraniums taillés au centimètre près ! Rien ne manque à la carte postale, je me trouve bien dans le Tyrol. Il y règne une ambiance paisible comme si, dans certaines vallées, le temps s'était figé. Il y a beaucoup de randonneurs, en famille principalement, sur les sentiers.
Déjà, nous devons nous attaquer à une belle remontée le long des cascades de Krimml, les plus hautes chutes d'eau d'Europe – 400 mètres – afin d'atteindre de hauts alpages.
L'air devient de plus en plus frais, pourtant nous sommes en plein soleil. La haute montagne n'est pas loin ; et pour preuve, cette multitude de glaciers qui nous entoure. Je mettrais bien les crampons pour y faire un tour... au programme d'un futur périple autrichien ? Dans cette attente, nous foulons les plus beaux chemins du pays dans un cadre où une multitude de couleurs s’entremêlent.
C’est à ce moment du trek que certaines personnes choisissent de s’isoler, de marcher un peu en retrait du groupe. Un temps pour soi qui est parfois nécessaire afin de souffler, se connecter au moment présent ou tout simplement apprécier la beauté environnante dans le silence. Il est vrai que nous sommes seuls sur le chemin, face à l’immensité de la montagne. Sortis de nos rêveries, nous faisons face à un deuxième col-frontière enjambé au bout de quatre heures de marche. Cette fois, c’est l’Italie qui se trouve de l’autre côté.
La fatigue se fait ressentir, très vite dissipée par le souvenir de très beaux moments. Nous avons dépassé les 2 600 mètres, la neige est encore présente sous forme de névés. Il n’en faut pas moins pour que quelques boules soient lancées ici et là. Nous tentons même quelques glissades, non contrôlées. Devant nous, le vallon de l’Ahrntal marque la fin de ce deuxième chapitre du trek.
Dolomites, le mythe
Nous laissons les alpages du Sud-Tyrol pour un environnement beaucoup plus minéral : les Dolomites, avec comme point d’orgue, la traversée du mythique massif de Puez. Le cadre impressionne, c’est comme si des montagnes avaient été déposées là, juste au milieu des prés. Des journées de marche plus fatigantes nous attendent ainsi que quelques passages techniques. Nous sommes rapidement subjugués par ces immenses falaises. La différence de terrain se fait ressentir, des cailloux et encore des cailloux. La vigilance est de mise pour les chevilles.
L’une des particularités des sentiers, ici, est qu’ils sont entrecoupés de passages câblés dans la roche, une aventure en soi ! Nous nous transformons en petits alpinistes pour ces quelques mètres aériens, tout cela en bonne sécurité. L’objectif est en vue : le Piz Boé et ses 3 152 mètres que nous atteignons, non sans mal, par un sentier rocailleux très engagé. De là-haut, le panorama est à couper le souffle, 360° sur les Alpes italiennes. Jour 13, c’est la dernière étape. Ce soir nous serons dans la cité des Doges. En attendant, nous devons rejoindre le lac Fedaia, un coin de toute beauté s’étalant sous la Marmolada, point culminant des Dolomites à 3343 mètres. Le sentier est raide, il monte dans un pierrier. Les premiers pas sont hésitants. La fatigue accumulée des dix derniers jours se fait ressentir.
Laurent motive les troupes avec un sourire aux lèvres : « Allez, encore une heure ou deux ».
Quelques dérapages contrôlés plus loin, nous finissons par atteindre un replat salvateur… Les tout derniers kilomètres passent en balcon au-dessus du lac, grandiose ! Comme si mère Nature voulait nous remercier de l’engagement physique démontré tout au long du trek. Un dernier plat de pâtes et nous partons pour Venise. L’aventure s’achève. À en voir les visages de bonheur de mes acolytes, il est fort à parier qu’ils repartiront en trek rapidement.